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Par jugement en date du 5 mars 2018, le Tribunal de commerce de Lille a débouté Marcelo BIELSA de ses demandes tendant à l’ouverture d’une procédure collective à l’encontre du LOSC (Lille Olympique Sporting Club Métropole).

Chose rare, ce dernier a même été condamné à verser au Club, la somme de 300.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour abus du droit à assigner en justice.

Pour mémoire, l’ancien entraîneur a été limogé par le Club en décembre 2017.

Il a alors saisi le Conseil de Prud'hommes de Lille, et assigné parallèlement ledit Club en redressement judiciaire par devant le Tribunal de commerce de Lille.

Outre le retentissement médiatique, cette affaire est aussi l’occasion de revenir sur la faculté offerte aux créanciers d’une société, d’attraire cette dernière en redressement ou liquidation judiciaire, considérant que la situation de ladite débitrice est irrémédiablement compromise.

En effet, parallèlement à la possibilité de poursuivre un débiteur en recouvrement de sa créance, le créancier insatisfait peut choisir, cumulativement ou alternativement, de saisir le Tribunal de commerce afin que celui-ci constate que la société endettée se trouve en cessation de paiements.

Ledit Tribunal, après une éventuelle enquête, peut alors choisir d’ouvrir à l’égard de ladite personne morale, une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.

S’agissant des critères permettant une telle action, l'article 7 du décret n°85-1388 du 27 décembre 1985 imposait à l’origine, de préciser dans l’assignation, « la nature et le montant de la créance et contenir l'indication des procédures ou voies d'exécution éventuellement engagées pour le recouvrement de la créance ».

Entre autre, il convenait donc d’avoir préalablement - et classiquement - sollicité la condamnation du débiteur, pour pouvoir s’en expliquer dans le cadre de l’assignation en redressement judiciaire ou liquidation judiciaire.

Par la suite, le décret n°94-910 du 21 octobre 1994 a supprimé l’adverbe « éventuellement » dudit article 7.

Autrement dit, le créancier devait nécessairement mentionner dans l’assignation, « la nature et le montant de la créance » ainsi que les « procédures ou voies d'exécution éventuellement engagées pour le recouvrement de la créance ».

La Chambre commerciale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 1er mars 2005 (n°03-12425), a même fait de ce critère une condition de recevabilité de l’action du créancier : « l'assignation d'un créancier contient, à peine d'irrecevabilité de la demande qui doit être relevée d'office, l'indication des procédures ou voies d'exécutions engagées pour le recouvrement de la créance ».

La Haute juridiction tirait alors les conséquences de la modification du décret de 1994.

Néanmoins, depuis la loi n°2005-845 du 26 juillet 2005 sur la sauvegarde des entreprises et l'ordonnance n°2008-1345 du 18 décembre 2008, l'article R.631-2 du Code de commerce ne prévoit plus, comme auparavant l'article 7 modifié, que la demande doit contenir l'indication des procédures ou voies d'exécution engagées.

Ainsi, depuis le 1er janvier 2006, le créancier n'a plus besoin d'engager ces poursuites avant d'assigner en redressement ou liquidation judiciaire.

Malgré cet indéniable assouplissement, la Cour de cassation a rappelé dans un arrêt en date du 28 juin 2017 (n°16-10025) que cette suppression ne changeait rien aux conditions relatives à la créance objet du litige, qui doit en tout état de cause être :

  • certaine : c’est à dire franche de toute contestation ; elle doit être née et incontestable de sorte qu’il n’existe aucun doute sur son existence
  • liquide, c’est à dire déterminée dans son quantum ; elle doit pouvoir être chiffrée en une valeur déterminée et quantifiable de manière définitive.
  • exigible, ce qui exclut les créances à terme ; la créance est exigible lorsqu’elle est arrivée à échéance, son paiement ne souffrant plus de délai.

C’est en outre, au jour où le Juge statue que doit être apprécié le caractère des créances (Cass. 1e . 16 décembre 1992).

Dans un arrêt du 28 juin 2017 (Com. 28 juin 2017, FS-P+B+I, n° 16-10.025), la Cour de cassation a par ailleurs rappelé que le créancier n’avait pas à justifier d’un jugement portant condamnation de son débiteur à honorer la créance dont il se prévaut.

Comme l’affirmait Monsieur l’avocat général LE MESLE dans son avis : « Pourquoi exiger un titre exécutoire alors que la saisine aux fins d'ouverture d'une procédure collective n'est pas un acte d'exécution, mais qu'au contraire, elle aboutit, si elle est suivie d'effet, à l'interdiction de ceux-ci et n'a d'autre conséquence que de soumettre le créancier agissant à une discipline collective qu'il aura concouru à créer ? »

Toutefois, en pratique, les Tribunaux de commerce seront bien plus enclins à examiner l’affaire en Chambre du Conseil (préalable indispensable à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire) dans l’hypothèse d’une condamnation préalable du débiteur et de l’engagement vain de voies d’exécution.

Une première lecture ayant toutefois lieu en audience publique, l’impact sur la réputation du débiteur peut être retentissant, d’où l’importance de se conformer aux critères ci-dessus et de se préserver d’un éventuel effet boomerang.

Surtout, lorsqu’elle prospère, cette action constitue un extraordinaire moyen de pression sur le débiteur récalcitrant, sauf à ce que ce dernier ait même accepté l’idée de sacrifier sa société…

Raphaël ARBIB - Richard ARBIB (Avocats) 
Avec la participation de Sara BENZOHRA, Auditrice de Justice

  Richard ArbibMaître Richard ARBIB, Avocat au Barreau du Val-de-Marne (Vincennes), intervient dans l’ensemble des domaines ayant trait au droit commercial, et au droit des sociétés.

 

 

 

 

Mots-clés
Assignation / Redressement judiciaire / Liquidation judiciaire / Cessation de paiements / Marcelo Bielsa / LOSC / Contentieux commercial / Avocat / Vincennes / Droit des affaires

 

 


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