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Soc. 20 déc. 2017, FS-P+B, n° 16-17.199

Le juge ne peut aggraver la qualification retenue par l’employeur dans le cadre de la lettre de licenciement.

C’est ce qu’est venue préciser la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 21 décembre 2017 (16-17.199) par la Chambre sociale.

En l’espèce, un employeur avait licencié un salarié pour cause réelle et sérieuse, alors même que celui-ci se trouvait en arrêt de travail en raison d’une maladie professionnelle.

A cet égard, la Haute juridiction a notamment relevé que, selon les constatations des juges du fond, l’employeur avait retenu, à l’encontre dudit salarié, « des propos à connotation sexuelle, un comportement indécent, des attitudes et gestes déplacés, revêtaient une gravité certaine compte tenu de leur nature même et rendaient impossible le maintien du salarié au sein de l'entreprise ».

L’intéressé se prévalait quant à lui des dispositions de l’article L. 1226-9 du Code du travail, qui dispose : « Au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie ».

Cependant et de ce point de vue, pour dire le licenciement fondé, la Cour d’appel avait fait prévaloir le fond sur la forme, retenant que l’employeur avait en tout état de cause souhaité « se placer sur le terrain disciplinaire et que le licenciement [avait] été prononcé pour une faute grave reprochée au salarié ».

Les Juges d’appel ont ainsi entendu « donner aux faits invoqués au soutien du licenciement leur véritable qualification », conformément au principe édicté à l’article 12 du Code de procédure civile, ainsi qu’à une certaine jurisprudence permettant au Juge de « qualifier les faits invoqués » dans la lettre de licenciement.

Dans le cadre d’un attendu de principe déjà utilisé notamment en matière de faute lourde, la Cour de cassation a néanmoins censuré un tel raisonnement, considérant que « le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l'employeur ».

Une telle solution porte nouvelle invitation aux employeurs à faire preuve d’une rigueur absolue dans le cadre de la rédaction de la lettre de licenciement, qui, faut-il le rappeler, fixe les limites du litige.

C’est d’ailleurs face à la rigidité de cette règle et à son interprétation stricte par la Cour de cassation, que le législateur a désormais offert a l’employeur - aux termes de l’article L. 1235-2 du Code du travail, modifié par l’Ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail – la faculté de « préciser » les motifs du licenciement soit sur demande du salarié, soit de sa propre initiative.

Le Décret n° 2017-1702 du 15 décembre 2017 relatif à la procédure de précision des motifs énoncés dans la lettre de licenciement est d’ailleurs venu préciser, à l’article R. 1232-13 du Code du travail :

« Dans les quinze jours suivant la notification du licenciement, le salarié peut, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé, demander à l'employeur des précisions sur les motifs énoncés dans la lettre de licenciement.
« L'employeur dispose d'un délai de quinze jours après la réception de la demande du salarié pour apporter des précisions s'il le souhaite. Il communique ces précisions au salarié par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.
« Dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement et selon les mêmes formes, l'employeur peut, à son initiative, préciser les motifs du licenciement. »

Le cas échéant, encore faudra t-il donc que l’employeur s’aperçoive suffisamment tôt de sa carence pour étayer sa lettre de licenciement, même s’il est bien évident que s’agissant de simples précisions, le fondement même du licenciement ne pourra être totalement modifié.

Raphaël ARBIB - Annie KOSKAS
Avocats

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